Tu ne sais rien, là est tout le fond du problème.

Un souffle traverse ton corps, c'est glacé, c'est avide, c'est ignoble. Tu ne sais pas comment tu es arrivé ici, tu ne parviens pas à te souvenir, tout est embrumé, douloureux dans tes pensées exquises. Il te semblait t'être tendrement attardée ce soir là, sur les lumières déclinantes de la fête foraine, récemment installée dans la belle Melbourne. Tu l'avais vue cette jolie petite fête avec ses forains toujours heureux, ses lumières tirant dans toutes les couleurs de l'arc-en-ciel. Fasciné, captivé, tu l'étais comme tous tes congénères, comme tous ceux qui s'avancent, innocents, purs. Tu as alors gouté aux barbes à papa, aux montagnes russes, aimé le paysage fabuleux que t'a apporté la grande roue. Et tout était merveilleux, grandiose, unique. Toute la nourriture était douce sur ta langue. Toute la vie semblait plus belle. Tu oublis le Grand Jeu, tu oublis tes ailes, tes souvenirs, tes regrets, tes dons, tes problèmes. Tes derniers souvenirs s'arrêtent devant le Palais des Glaces.

Château de miroirs, brillance infernale, secret inavouable, tu t'es engouffrée dans les dédales devenant Thésée contre le Minotaure. Excité, tu n'as pas vu que tu t'engouffrais en enfer. Tu as tourné les yeux brillants, lumineux. Tu n'as pas vu où tu mettais les pieds. Et au fil des tes pas, tu n'as plus revu que ton image déclinante sur les différents miroirs que tu voyais. Tu n'as plus suivi que ton instinct, perdant tes repères, chassant l'idée de te perdre. Tu as suivie ton cœur. Et maintenant, tu te retrouve piégé, piégé avec ta propre image, tes propres souvenirs. Ce n'est pas si grave, on finira bien par te trouver, te ramener sur le chemin de la lumière.

Mais ne vous a-t-on jamais dit que les miroirs sont les instruments de la vanité & du diable? N'avez-vous pas peur que votre reflet vous file entre les doigts? Oui, tu ne rêves pas. Tu vois bien ton reflet s'animer, se mouvoir, se détachant progressivement du miroir & susurrer de la voix qui est tienne tes plus intimes failles, te reprocher tes vices, tes souvenirs, tes regrets. Et tout t'échappe en même temps que la mystérieuse ombre de toi-même qui rit d'un rire gras & maladif. Et tu tentes de le retenir. Tu tentes de courir après, mais quand tu percutes une autre personne & que vos ombres s'enfuient ensemble, il ne te reste plus qu'à prier ou à coopérer. A toi de voir, pourtant tu sens déjà quelque chose s'enfuir avec ton ombre, tu sens déjà une partie de toi s'envoler à tire d'aile. Dépêche-toi, rattrape le, cours jusqu'à en perdre haleine mais retrouve le. Retrouve-le car tu ne connais pas le prix de ce que tu vas perdre sinon. Tu ne sais pas. Tu ne sais rien.

L'intrigue prendra la forme d'un topic commun présent dans la section spéciale fête foraine créée à votre intention. Attention, la fête foraine ne dure qu'un mois... Promenez-vous bien dans le palais des glaces.